Imaginez : 300 discours du candidat UMP aux dernières présidentielles, passés par
la moulinette des deux linguistes Louis Jean Calvet et Jean Véronis. Cela a donné "Les mots qui ont fait gagner Nicolas Sarkozy", publié en mars 2008 aux éditions du Seuil. Un ouvrage dans
le prolongement de ma dernière intervention au CELSA, consacrée à l'évolution de la construction du discours des politiques depuis 50 ans. Qu'en retenir au delà de l'empreinte
indéniable d'Henri Gaino? Primo,
en véritable communic'acteur, Nicolas Sarkozy utilise des phrases courtes. 21 mots en moyenne (vous vous souvenez de la règle des 3 C chère
aux journalistes?) Tout comme VGE en son temps, il traduit par là sa modernité. Lors de son débat télévisé avec Ségolène Royal (aux phrases plus complexes, riches en subordonnées),
cette tonicité du langage sera un des éléments gagants. Il colle ainsi au tempo auquel est habitué quotidiennement, le consommateur de publicités radio ou TV. De plus,
son
vocabulaire est limité. A l'opposé d'un Jean-Marie Le Pen au vocabulaire de campagne très riche, 514 mots différents en moyenne, Nicolas Sarkozy est à
peu près à égalité avec Ségolène Royal et François Bayrou avec 450 mots différents environ pour 1 000 mots pris au hasard. Mais c'est surtout à
de nombreuses répétitions de
formules ou d'éléments de discours (son taux de « copier-coller » atteint 20 % d’un meeting à l’autre) que se reconnaît le plus le style "Sarkozien".
Parmi les autres particularités relevées par les auteurs :
l'utilisation régulière de l'anaphore, procédé rhétorique bien connu des amateurs de
poésies (c'est en fait la répétition des débuts de phrases) et
l'emploi d'un style concret, où les verbes prennent le pas sur les noms. Exemple : valoriser le travail,
plutôt que la valorisation du travail.